
L’acteur Jean Quartier Châtelain restitue pendant 1h50, mille vers de Pessoa.
Planté sur un ponton métallique, il nous embarque pour un voyage au-delà des mers, vers nous-même. Le dépouillement de la scène, la simplicité des mots, la puissance du comédien qui passe du plus ténu des murmures au cri, permettent de mettre en lumière les contradictions de l’être humain, sa complexité. Douceur de l’enfance, cruauté et compassion; je ne savais de Pessoa que ses multiples identités et j’ai eu le plaisir d’entrevoir pourquoi ce poète était considérable. Lui qui traine « la douceur des mœurs » sur le dos « comme un ballot de dentelles », en appelle à la piraterie, à l’inévitable bouteille de rhum quand les rêves de voyage débordent, quand la poésie ne s’attarde pas aux bastingages en bois et va faire des étincelles avec la modernité.
« Mes songes ôtent un peu leurs mains de mes yeux.
Au fond de moi il n’y a qu’un vide, un désert, une mer nocturne ».
Nul besoin d’armer une goélette pour aller vers la lucidité, des mots triés par un poète peuvent suffire.
